Le ski est apparu au Grand-Bornand comme dans le reste de la région de Thônes dans les années 1900, plus précisément entre 1902 et 1905, années durant lesquelles quelques étrangers vinrent l’hiver avec leurs planches à la recherche de champs de neige, vites imités par les jeunes du village qui se fabriquaient du matériel avec les moyens du bord à savoir des planches d’érable ou de frêne dont l’avant était artisanalement recourbé à la vapeur et tenaient aux pieds au moyen de lanières ou de ficelles…
Dans les années 1910 le ski fut ainsi pratiqué par des locaux et quelques annéciens venus à Thônes par le tramway :
Puis de Thônes il fallait poursuivre en traîneaux jusqu’au village voire au Chinaillon et dans la vallée du Bouchet :
A moins de disposer d’une automobile, toutefois bien inutile dès lors qu’il y avait de la neige car les routes n’étaient en ce temps-là guère dégagées et les hivers plus rudes qu’aujourd’hui !
Un jour, un menuisier du village du nom de Jean-Marie Jean remarqua sur un catalogue Manufrance (de Saint-Etienne) des modèles de skis, ainsi que des ferrures pour skis qu’il fit venir, fabriquant lui-même sa première paire de skis paraît-il fort réussis !
Il fit des émules, qui bien vite lui commandèrent leurs propres planches, contribuant ainsi à populariser parmi les villageois ce sport encore méconnu.
Cette activité de sports d’hiver, et de ski en particulier, cessa hélas dès le début de la première guerre mondiale et jusqu’à sa fin, mettant même du temps à reprendre après…
Dans les années 1920, les skis dataient d’avant-guerre et étaient en mauvais état, les gens appauvris par le conflit ne pouvaient s’en payer de nouveaux à l’heure où ils manquaient encore de l’essentiel.
Ainsi le Touring-Club de France prit-il les choses en main en offrant aux sociétés des skis : c’est la raison pour laquelle fut créée en 1923 la société des skieurs bornandins, forte d’emblée de 40 inscrits, dont le but était de faire passer à ses sociétaires le brevet de skieur militaire qui leur permettrait ensuite de choisir leur régiment.
En 1924 fut annoncé pour la fin de l’année un premier grand concours, annulé faute de neige…cet échec ralentirait pour des années encore le développement du ski sur la commune.
Il ne reprendrait qu’en 1929 à l’initiative du nouveau propriétaire de l’hôtel “de la Croix Saint-Maurice”, M. Martel, qui fédéra autour de lui divers acteurs majeurs de la commune qui firent ériger deux tremplins de saut, aménager une patinoire et reconnaître des pistes, signant l’acte de naissance de la “station” ainsi nommée pour la première fois dans ce tract fondateur ici publié en exclusivité :
On aura noté dès 1929 la prépondérance des cars désormais préférés au tramway, les routes étant désormais régulièrement déneigées, du moins jusqu’au village…
Il rénova son établissement (relié à celui “du commerce” par une passerelle) et s’attacha les services de deux moniteurs de ski : la clientèle d’alors était fidèle et séjournait longuement, restant plusieurs semaines voire plusieurs mois !
L’année 1930 fut particulièrement active puisque des pistes de luges et de bob et un troisième tremplin vinrent compléter l’offre, faisant du Grand-Bornand une station parfaite pour le ski tandis qu’on organisait déjà le transport depuis les vallées : des cars tous les jours entre Annecy et Grand-Bornand, deux fois par jour les dimanches, des cars spéciaux au départ de la gare d’Annecy le samedi avec retour le dimanche soir pour les lyonnais tandis que le tramway reliant la ville à Thônes cessa définitivement de fonctionner en mai face à cette concurrence.
Même système de cars depuis Genève via Annemasse les dimanches et jours fériés suisses.
Le 12 août 1931 fut fondé le “syndicat d’initiative du Grand-Bornand et de la chaîne des Aravis” et dès lors fêtes et animations furent organisées tout au long des saisons d’hiver :
En 1932 fut ouverte la “nouvelle route moderne du col de la Colombière”, déneigée jusqu’au Chinaillon dès l’hiver suivant : dès lors un service de cars hivernal ferait relativement régulièrement mais ponctuellement la navette entre le village et le Chinaillon, popularisant ainsi ses champs de neige :
Le 30 janvier 1936 le Mont Lachat de Châtillon fut gravi pour la première fois en hiver par deux genevois, et un peu plus tard dans l’hiver les championnats militaires de ski nordique furent organisés, datant l’apparition du ski de fond dans la vallée du Bouchet.
Aidées par la soif de loisirs et les congés payés, les années 1930 furent ponctuées de pas moins de quatorze fêtes de sports d’hiver ou concours !
M. Martel prit des contacts pour constituer une société ayant pour but la construction d’un téléférique partant de la scierie Bétemps jusqu’au Châtillon.
Il essuya hélas un refus du maire, influencé en cela par le curé Blanc qui craignait que cet afflux de touristes ne transforme négativement la mentalité des jeunes du pays, et la mobilisation de 1939 n’aida pas un M. Martel écœuré…
Par rétorsion il ferma durant toute la guerre son hôtel de la “Croix Saint-Maurice”, alors le seul à être réellement confortable, ce qui eût pour effet immédiat de stopper toute activité économique hivernale du village alors même que le Grand-Bornand aurait pu poursuivre son développement malgré le conflit à l’instar d’autres stations de ski.
Après-guerre, plutôt que de rouvrir son affaire, M. Martel préféra s’en séparer et quitter le Grand-Bornand pour Saint Gervais dont il deviendrait plus tard maire, et accessoirement président de la FFS.
Dans ce contexte de dissensions l’activité ne reprit qu’au milieu des années 1940 quand les commerçants du Grand-Bornand constituèrent le 12 décembre 1944, sous l’impulsion cette fois de leur nouveau mentor M. Guy Salino, la S.A “du téléski du Grand-Bornand” pour enfin doter le village d’une remontées mécanique digne de ce nom.
Dès l’année suivante, en 1945, la construction aux Dodes d’un fil neige sur lequel les skieurs bornandins pouvaient s’initier près des fermes non loin de l’actuel camping débuta, financée par la vente d’actions souscrites par les villageois :
Comme avant-guerre, les cars vers le Chinaillon reprirent à une faible fréquence, ne permettant pas encore d’y installer en continu une vraie économie du ski.
Les tremplins et les pistes de luge et de bob, qui n’avaient pas cessé d’être utilisés, connurent une nouvelle fréquentation.
Puis en 1946, ce fut au tour du premier vrai téléski, particulièrement difficile pour la clientèle des skieurs de l’époque qui n’avaient ni le niveau ni le matériel pour affronter sereinement la pente très raide orientée plein nord et sans arrêt verglacée par la succession des redoux et des regels courants à cette (basse) altitude :
Le bâtiment du téléski, le célèbre chalet “Marie Liesse” toujours existant et situé près de l’actuelle patinoire, abrita le premier bar de front de neige de l’histoire bornandine !
Ainsi fut constitué un petit domaine skiable mécanisé au village :
Le grand téléski, en plus d’avoir une pente très inadaptée au niveau des skieurs et une qualité de la neige très souvent mauvaise qui l’empêchèrent d’être rentable, eût hélas un fonctionnement défectueux : les pylônes de bois, qui pourrissaient au ras du sol en compromettant l’exploitation de l’appareil, devaient fréquemment être changés.
Il ne tourna ainsi que trois hivers avant son démontage dès 1950 : après ceux de 1914, de 1924 puis de 1939, ce fut un nouvel échec pour faire évoluer le ski mécanisé…
Après quelques années durant lesquelles seul le fil neige fut utilisé, la S.A “du téléski du Grand-Bornand” reprit de l’activité en 1953, en cherchant de nouveaux capitaux…
Il fut décidé d’implanter le nouveau domaine skiable plus haut, sur l’envers du Chinaillon, pour des raisons d’enneigement et d’ensoleillement comme nous le montre cette photo de M. Félicien Missillier prise avant l’aménagement et qui montre aussi la charmante passerelle de bois :
Elle y fit installer son téléski entièrement métallique par la société “Pomagalski” au lieu-dit “les Outalays”, déjà annoncé dans la brochure 1953/54 dichromique rouge et noir du syndicat d’initiative, mais sans photos puisqu’il n’était pas encore terminé :
On note que le fil neige de 1946 officiait encore aux Dodes, qu’il y avait un home d’enfants (La Gaudinière, au Chinaillon) et que le chalet multi centenaire était tout de même qualifié de “sympathique” à l’heure où on se séparait pourtant sans vergogne de ses meubles et bâtiments anciens pour des constructions modernes ou des cuisines en formica !
Pendant ce temps-là, et à propos de modernisme, le chantier du téléski du Chinaillon fut dûment annoncé au bord de la route du col en face de laquelle il se poursuivait :
Mais ce téléski “de la piste du Chinaillon”, après des débuts prometteurs, connut également quelques difficultés de fonctionnement d’abord puis surtout de fréquentation notamment en raison de son accès difficile pour la clientèle…
En effet, la route qui menait à l’époque au Chinaillon était étroite et n’offrait en haut que peu de possibilités de stationnement, les rares automobilistes se garaient à la Place et ralliaient le téléski à pieds avant de faire la queue.
Quant aux autres skieurs, ils s’entassaient dans la rudimentaire navette à six roues en bois General Motors rachetée aux américains après leur départ qui, munie de chaînes à neige, pouvait les acheminer avec une plus grande régularité que ne le faisaient les cars jusqu’au restaurant de Guy Salino, le “Fou Blanc”, situé au pied du téléski :
(photos de M. Félicien Missillier)
Cette “route de l’envers” non goudronnée ne comportait qu’un pont sur le torrent du Chinaillon (en dessous du hameau de “la Place”, en contrebas de l’école) et elle arrivait de plus en “cul de sac”, ce qui rendait les demi-tours périlleux…
S’il y avait de la neige, on rentrait au village en tirant vers le “bois à Casimir” depuis le sommet du tire-fesse, avant de gagner la crête sous “la Taverne” pour redescendre en vallée, qu’on atteignait en suivant à skis les bords de la route des Envers !
Toujours en dichromie rouge/noir et sur le modèle des précédentes, la brochure 1956/57 vante un paradis météorologique “étalé au soleil” sans “ni vent ni brouillard”, doté d’un air “sec et vivifiant” :
L’œil averti aura noté le déménagement du fil-neige sur l’adret, une bien curieuse idée, tandis que les distractions estivales se limitent aux randonnées en “haute montagne” et à la pêche à la truite…
Ce dépliant recelait des feuillets imprimés sur papier soie glissés à l’intérieur, et très instructifs :
Celui-ci nous apprend qu’un téléski à l’assaut du Lachat de Châtillon était à l’étude dès 1956 !
En janvier 1957, au cours de la même saison, la célèbre revue “Le Ski” consacra son numéro 144 au Chinaillon, un tirage qui ferait date en ce sens qu’il ferait connaître la station au grand public :
Il est un trésor d’illustrations d’époque, fidèle témoin de la vie au village à la fin des années 1950 :
Le magazine nous confirme qu’un téléski était bel et bien en projet vers le Mont Lachat de Châtillon, mais qu’il ne pouvait pour l’heure aboutir du fait de l’obstruction d’un propriétaire :
La station y fit publier une réclame, la positionnant dès cette époque et très clairement sur le ski de début de saison :
On ne s’étonne guère avec une telle mise en lumière de la reprise des investissements en 1958, matérialisée par la construction du téléski du Baby, qui redémarra le développement du domaine skiable.
Ce téléski, plutôt destiné aux skieurs moyens qu’aux débutants, eut à son tour de gros problèmes de fonctionnement à sa mise en service car il fallut en faire changer les poulies, celles du constructeur d’origine Pingon étant défectueuses !
On le voit ici hors service durant l’hiver 1958/59 :
Le grand téléski fût dès lors rebaptisé téléski “des Gettiers”, nom du hameau près duquel il arrivait.
Le dépliant dichromique bleu/noir de la saison 1959/60 dont les codes graphiques sont typiques de son époque, reprenant les slogans des précédents :
Le Chinaillon doté désormais de deux appareils était devenu un petit stade de neige mais en dépit de la création d’un étroit chemin goudronné passant au pied des téléskis en direction de la Côte au début des années 1960, l’accès restait problématique et la fréquentation ne décolla pas vraiment ce qui n’arrangea pas les finances de la S.A “du téléski du Grand-Bornand”…
En 1961, la S.A décida toutefois d’impulser une nouvelle dynamique en installant la plus grande remontée mécanique jamais réalisé au Grand-Bornand, le téléski de la Floria au Chinaillon, long de plus de 1700 mètres et auquel on pouvait accéder à la Floria depuis le centre du Chinaillon au moyen de l’improbable passerelle de planches située en contrebas du chemin du home d’enfants “la Gaudinière” :
Il allait enfin permettre d’atteindre un sommet, celui de la Floria (1750m), qui deviendrait dès lors le nouveau point culminant du domaine skiable et de par ses caractéristiques propres méritant nombre de superlatifs, mais surtout par les innovations techniques mises en œuvre pour son chantier relativement pénible comme l’hélicoptère, cet appareil marqua tout particulièrement les bornandins, qui montèrent à bras d’homme sur des charrettes ses pylônes tubulaires :
(photos de M. Félicien Missillier)
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Les pylônes de tous ces téléskis étaient peints en gris métallisé et ces premières réalisations jetèrent les bases du domaine skiable du Chinaillon, auquel on ne pouvait hélas toujours pas accéder facilement en voiture, la route des pistes n’étant pas prolongée vers l’est : le seul pont carrossable restait celui de l’école, et la route stoppait toujours l’hiver au Baby…
Au cours de cette année, des changements cruciaux pour la suite s’amorcèrent : la relative réussite de la S.A “du téléski du Grand-Bornand” fondée je le rappelle par les commerçants, excita les convoitises des grand propriétaires terriens qui, jaloux, voulurent eux aussi leur part du gâteau…
Ils se regroupèrent donc afin de créer une petite S.A concurrente de la S.A “du téléski du Grand-Bornand” sous le nom de S.A “du téléski de la Mulaterie”, qui entama le chantier de son téléski de la Mulaterie, long de 700 mètres environ, près du hameau éponyme au bord du bois de la Cour.
Toujours en 1961, la commune décida indépendamment des deux S.A la construction du petit téléski du Terret (qui bien qu’abandonné est actuellement la plus ancienne remontée présente sur le domaine skiable) et de l’exploiter au sein d’une régie municipale comme “téléski de village” visant une clientèle débutante de proximité…
Faute du dépliant qui les abritait, voici néanmoins les désormais fameux feuillets sur papier soie de la saison 1961/62, toujours aussi instructifs et maintenant au nombre de deux :
Le secteur hôtelier était peu développé, moins que dans d’autres stations de ski, tandis que le téléski de la Floria était annoncé en tant que nouveauté.
Ce feuillet recelait pour la première fois un plan des installations de remontées mécaniques et des pistes, du fait que le nombre de celles-ci était devenu suffisamment important :
On aura noté que ces encarts glissés dans les dépliants du syndicat d’initiative ne mentionnent que les téléskis de la “Société du Téléski du Grand-Bornand” notamment le “nouveau téléski de la Floria”, omettant celui de la “Société du téléski de la Mulaterie” et plus étonnamment encore celui de la régie municipale nommé “le Terret”… ceci en dit suffisamment long pour expliquer ce qui se passerait durant les vingt années suivantes !
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Après des débuts difficiles, les courageux investissements de ce début des années 1960 allaient-ils éloigner la menace permanente de faillite dans laquelle la S.A “du téléski du Grand-Bornand” se trouvait depuis sa création ou précipiter l’échéance ?
Nul ne pouvait le dire, car la neige se fit désespérément attendre en cette fin 1961 où il fallut tester le téléski de la Floria à peine livré en prenant les perches à pied :
(M. Félicien Missillier a pour les besoins de cette photo laissé son appareil, prenant ici la pose une perche à la main)
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La S.A “le Téléski du Grand-Bornand” n’entendait pas se laisser distancer par cet embryon de concurrence, sentant bien chez la S.A “du téléski de la Mulaterie” un très fort potentiel financier mais surtout foncier, en dépit de l’installation de son fabuleux téléski de la Floria qu’elle inaugura enfin le 11 janvier 1962 :
(photo de M. Félicien Missillier)
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Malgré une ligne hors du commun de par sa difficulté et la prodigieuse vitesse à laquelle il tournait, “le téléski le plus long et le plus haut de Haute-Savoie” eût instantanément le succès prévu, à tel point qu’il fût saturé dès qu’apparaissait le moindre rayon de soleil, pouvant décourager la clientèle…
(photo couleur de M. Félicien Missillier)
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Il faut dire quand même que son débit était digne de celui d’un appareil des années 1950, alors même qu’en 10 ans les téléskis avaient beaucoup progressé sur ce point…
La société lança donc dans la foulée la construction du téléski de Châtillon, partant du hameau de la Côte et arrivant au col du même nom d’où s’offrait une vue somptueuse sur la chaîne des Aravis et l’appareil, toujours un “Poma”, marchait au mazout car il n’était pas relié au réseau électrique !
La zone, agréable et peu technique, était comme nous l’avons vu fort connue des randonneurs à ski depuis les années 1930 mais jusque-là inéquipée, malgré les velléités d’accéder au sommet du Lachat duquel il constituait une première approche…
Le tracé particulièrement étrange de cet appareil qui existe encore avait pour but de contourner la zone à l’époque avalancheuse de l’envers des Arces, la beauté et la bonne qualité de la neige du site exposé au nord-ouest ainsi que le célèbre “Bois à Casimir” firent son succès et en prime, il devint plus facilement possible de rallier à skis le village via de superbes nouveaux itinéraires hors-pistes :
En contrebas, dans la vallée du Bouchet, le foyer de ski de fond du Grand-Bornand fut créé et c’était le premier à voir le jour dans le département !
En 1963 la piscine municipale fut créée entre le mini-golf et les tennis déjà existants, développant ainsi cette zone où se trouvait aussi la patinoire naturelle.
C’était une des premières du massif si ce n’est la première, offrant aux estivants une distraction supplémentaire s’ajoutant aux randonnées et à la pêche à la truite, mais aussi au tennis et au mini-golf apparus les années précédentes :
Et la “Société des Téléskis du Grand-Bornand” installa le premier véritable téléski pour grands débutants du Chinaillon nommé “téléski enfants”, partant du bord de la route menant aux Outalays et arrivant en contrebas du chemin qui menait à la Côte :
Le téléski de la Mulaterie déménagea quant à lui au départ du hameau, et fut rallongé sous le nom de “téléski de la Cour” où il ne tourna presque pas du fait de l’absence de neige durant l’hiver 1963/64 comme nous le montre cette photographie de M. Félicien Missillier :
En 1966 la S.A “du téléski de la Mulaterie” fut recapitalisée, devenant la S.A “Chinaillon Beausite”.
Dotée désormais de plus gros moyens financier, elle déclara la guerre à la S.A concurrente en installant le grand, rapide et vertigineux téléski du Châtelet destiné à faire venir une fraction plus sportive de la clientèle “volée” à la S.A “le téléski du Grand-Bornand”, un tire-fesse que l’on aperçoit en construction sur cette photo :
Il se dit que ce téléski devait atteindre le sommet de la Floria pour doubler le téléski des concurrents, mais le fait est qu’il s’arrêta en dessous… cette photo est aussi une excellente illustration de l’urbanisation du haut de “Super Grand-Bornand” notamment du Samance.
Car notez que l’appellation “Chinaillon” était à l’époque réservée au seul vieux village : juste après la construction dans les années 1960 des premiers immeubles sur une zone différente en direction du col (dont “les Rhododendrons” et “la Résidence”), la station fut en effet rebaptisée “Super Grand-Bornand”, sans doute par effet de mode !
En 1966 le foyer de ski de fond s’attache les services d’un initiateur.
Plan coupé pour ne montrer que le Grand-Bornand, en face interne du dépliant 1966/67 édité en polychromie :
Il mentionne le téléski “du Terret” et encore le fil neige “Ecole” au village, revenu sur l’envers, mais aussi le nouveau nom du téléski pionnier “des Gettiers” rebaptisé une seconde fois “Les Outalays”… mais plus les pistes !
S’il a fallu couper ce plan c’est qu’outre la totalité des installations du Grand-Bornand, il représente aussi la totalité des installations de la Clusaz et de Saint-Jean de Sixt, constituant à ce titre l’un des plus anciens plans de ce qui deviendrait l’Espace Aravis dont les installations sont récapitulées par un document unique pour la première fois traduit en langues étrangères, signe d’une ouverture vers l’international :
Il y eût donc à cette époque une indéniable volonté des acteurs du massif de se rapprocher à des fins de conquête d’une clientèle étrangère venue par avion depuis Genève, du moins sur la face interne du dépliant car celle de l’extérieur était bien dédiée au Grand-Bornand :
A noter un premier logo qui n’est autre que les armoiries du village !
L’année suivante, en 1967, la Beausite s’attaqua au monopole de la “société du téléski du Grand-Bornand” sur la clientèle débutante en installant à son intention les téléskis du Venay (sur la route du col de la Colombière) et du Mini-Schuss, sur l’envers du Chinaillon :
Les pylônes de ses téléskis peints en rouge minium étaient caractéristiques des installations Beausite donc aisément reconnaissables mais ces appareils, du fait qu’ils ne formaient pas un domaine bien relié, n’étaient pas encore à même de concurrencer sérieusement le téléski de la Floria et attiraient plutôt une clientèle peu sportive et surtout plus clairsemée…
La S.A “du téléski du Grand-Bornand” prit de surcroît en octobre 1967 le nom plus adapté et plus vendeur de S.A “des téléskis du Grand-Bornand”…
La Beausite, désavantagée, ralentit dès lors de façon délibérée le développement de la S.A “du téléski du Grand-Bornand” en n’accordant pas le passage des futures remontées mécaniques sur les terres de ses actionnaires : ainsi, en 1967, le projet fait par la S.A “les téléskis du Grand-Bornand” de liaison du Chinaillon avec le village tomba à l’eau…
Le dépliant 1967/68 se recentra sur le Grand-Bornand, conservant toutefois un plan des installations sans les pistes à l’échelle du massif, que voici montré dans son intégralité :
Les téléskis du Mini-Schuss et du Venay y sont apparus, ainsi au village que celui du Pont de Suize, dit aussi “le triangle” du fait de la forme particulière de l’agrès auquel il fallait s’accrocher :
Ce dépliant 1967/68 arbore en face externe de remarquables illustrations traitées dans le plus pur style “pop” de l’époque, qui font de lui le plus original jamais édité par le syndicat d’initiative :
Comme le précédent, ce plan arbore lui aussi les armoiries du village et contient des informations traduites en trois langues !
En 1968, Jeunesse et Sport fit appel à M. Paul Bastard, qui devint moniteur officiel de ski de fond, un des pionniers au Grand-Bornand de cette discipline popularisée par les jeux olympiques de Grenoble.
Les années 1960 se terminèrent et les années 1970 démarrèrent sans nouveaux investissements notables : en 1971 la commune entreprit toutefois d’arbitrer le conflit entre les sociétés “des téléskis du Grand-Bornand” et “Chinaillon Beausite” en leur allouant à chacune une zone à développer, pour éviter qu’on en arrive à des installations parallèles en doublons comme ce fut le cas pour les téléskis Baby et Mini-Schuss, qui se seraient faites au détriment de l’expansion du domaine alors enjeu de la plus haute importante face à la concurrence des domaines des nouvelles stations intégrées…
En 1971 le foyer de ski de fond devint aussi un centre école pour répondre à la demande qui avait explosé suite aux précédents jeux olympiques.
Ce fut non plus un dépliant mais un livret petit format qui sortit à l’automne 1972, annonçant son lot de nouveautés sur fond de couleurs toujours vives :
On note que les installations et nouveautés des deux sociétés de téléskis sont mentionnées dans ce document unique à fond jaune, donc très voyant !
En 1972, la S.A “des téléskis du Grand-Bornand” toujours dans son idée de relier le Chinaillon au village mais en difficultés financières ne put qu’installer le petit téléski de la Côte et moderniser celui de Châtillon, alors que le développement du domaine skiable commença à s’accélérer de façon spectaculaire sous la pression de la S.A “Chinaillon Beausite”qui voulait éviter le dépôt de bilan à moyen terme, donc devait coûte que coûte augmenter sa clientèle en investissant dans l’extension de son parc d’installations.
Elle installa sur la vallée du Maroly, le territoire qu’elle avait pour mission d’aménager, rien de moins que trois nouveaux téléskis : la Cour 1, les Bouts et son fleuron le téléski du Maroly, alors le plus haut de la station, le téléski de la Cour étant rallongé afin d’accéder au Maroly prenant le nom de “Cour 2” ce qui fit de cette campagne d’aménagement la plus importante jamais réalisée au Grand-Bornand jusque-là !
Le plan 1972/73 fait carrément l’impasse sur les quatre nouveaux téléskis (Côte, Cour 1, Maroly et Bouts) alors même qu’il les indique en marge, ne mentionnant pas plus que ses prédécesseurs les pistes, une pratique très courante à l’époque :
La légende horizontale fait une dernière fois mention de l’appellation “Super Grand-Bornand”, déjà rebaptisé Chinaillon sur le plan lui-même.
On rentrerait du Maroly en empruntant le téléski des Bouts puis en rejoignant le sommet de la Cour 2 via un chemin au flanc de la Floria via un itinéraire qui, bien que peu fréquenté, existe encore et est même régulièrement damé.
L’immobilier était alors en pleine explosion et le Grand-Bornand fut bétonné, notamment sous la houlette de l’incontournable Pierre Pochat, président de la S.A “Chinaillon Beausite” mais aussi et surtout promoteur :
Quelques publicités pour les magasins de sport les plus en vogue de l’époque :
Les hôtels, finalement encore relativement peu nombreux sur la station :
Durant les années 1961 à 1974, il exista donc deux forfaits : les “rouges” et les “gris”.
Les deux compagnies concurrentes communiquaient dans les mêmes publications, celles du syndicat d’initiative et parfois sur une page commune, mais conservèrent des encarts différents dans lesquels chacune mettait encore en avant son atout principal !
Pour la S.A “les téléskis du Grand-Bornand” c’était le téléski de la Floria :
Pour la S.A “Chinaillon Beausite” c’était le “nouveau domaine skiable du Chinaillon”, comprenez le secteur du Maroly dont l’équipement lui avait été alloué, et la société ne comptait pas en rester là à en juger par sa réclame exposant la future extension du secteur du Maroly :
En effet, il était prévu de construire quatre téléskis : le “téléski de la Sonnerie” (non réalisé mais dont le tracé est celui de la première moitié du téléski du Chouly), le téléski “de l’Almet” (le seul qui ait été effectivement réalisé sous ce nom), le téléski “des Terres Rouges” (non réalisé) et enfin le téléski “du Vacheret” (réalisé, mais sous le nom de “Prarian”).
Toutefois, les deux compagnies présentaient leurs tarifs dans un même encart, probablement pour satisfaire la demande de la clientèle lassée de devoir choisir entre deux domaines skiables sur le même site.
Devant l’expansion tout azimut de l’urbanisation, il fallut repenser le système de navette reliant le village au Chinaillon et le village à La Clusaz, des véhicules qui n’officiaient à l’époque qu’en haute saison :
Pour la S.A “les téléskis du Grand-Bornand” les bénéfices diminuèrent encore, minés par la concurrence féroce de la Beausite qui possédait des installations désormais plus performantes en débit et plus intéressantes du fait des champs de neige desservis, tant et si bien qu’elle fit faillite en 1973 avant d’être dissoute : une page était définitivement tournée et pas la moindre, celle des pionniers de l’équipement du domaine skiable…
Ne pouvant se résoudre à voir son domaine skiable lui échapper, la commune reprit aussitôt l’exploitation des installations au sein de la régie existante et s’engagea dans une fuite en avant sans précédent dont le financement provint de la multiplication des permis de construire jusque-là très limités, principalement accordés dans les zones préalablement viabilisées dans les années 1960 donc utilisant l’infrastructure existante (routes, approvisionnement en eau,…) :
Les résidences neuves offrant des surfaces moins généreuses donc plus accessibles aux acheteurs y poussèrent comme des champignons générant de ce fait de grosses recettes à court terme via les taxes particulièrement élevées au Grand-Bornand :
Ce fut là le vrai coup de génie de la municipalité de l’époque qui, en réaction à la crise générée par le premier choc pétrolier, ne s’assura rien de moins que la garantie d’une trésorerie absolument indépendante de tout aléa conjoncturel.
Dès lors cette politique ne cesserait plus, d’autant moins qu’à partir de ce moment-là, le front de neige fut enfin desservi par la toute nouvelle route des pistes le long du torrent du Chinaillon qui permit de faire exploser l’offre de stationnement par la création progressive de place de parking sur tout son long qui allaient accompagner la croissance du village et de ses infrastructures :
Toujours en 1973, furent construits les deux premiers télésièges de la station, le biplace débrayable de la Joyère (le quatrième installé en France par la société Pomagalski) et le biplace fixe de la Taverne, les deux maillons d’une liaison village/Chinaillon attendue depuis 1967 en chantier sur ces exceptionnelles photos de M. Félicien Missillier :
Deux téléskis, le Roc des Arces et les Combes, furent également construits cette même année au niveau de la station intermédiaire entre les deux télésièges sur le plateau de la Joyère afin d’offrir enfin aux skieurs débutants des pistes prévues pour eux et ensoleillées en accès direct depuis le village alors que l’offre jusque-là était ridicule…le record du plus gros chantier de 1972 détenu par la Beausite était désormais battu !
La liaison fut opérationnelle en janvier 1974 :
Elle s’accompagna également de pistes, dont la piste dite “des Envers” qui arrivait au village à l’altitude de 930m quand l’enneigement le permettait c’est-à-dire pas toujours…sa fin fût enfin réalisée et prit la forme d’un chemin serpentant en forêt au-dessus du torrent, et elle permettrait enfin aux skieurs d’éviter de skier sur la route de l’Envers pour rallier le village !
La fréquentation du domaine explosa donc dès l’hiver 1973/1974, comme l’immobilier soutenu par une crise pétrolière désormais durablement installée et très encouragé par la municipalité.
Tous les bénéfices furent aussitôt réinvestis à l’été 1974 par la régie dans la poursuite de l’aménagement de la vallée du Maroly, dans laquelle furent installés trois nouveaux téléskis par le constructeur haut-savoyard Montagner, il s’agissait des téléskis du Chouly, du Prarian et de l’Almet dont les 38 pylônes au total tous prééquipés furent montés dans la même journée à l’hélicoptère, sur fond de neige abondante et pour une fois tenace comme le montrent ces fabuleuses images de M. Félicien Missillier :
Le Chouly était, avec ses 1850 mètres de long, la plus longue des remontées mécaniques du domaine skiable : ces trois appareils seraient les derniers grands téléskis à usage public à être installés sur le domaine car les télésièges, apparus sur le domaine l’année d’avant, allaient désormais les supplanter de façon définitive sur les longs parcours…
D’ailleurs le troisième d’entre eux, la Tolar, fut commencé cette même année… seulement la neige précoce apparue durablement dès septembre 1974 et visible sur les photos ci-dessus ne permit pas son achèvement : certains ancrages de béton n’avaient pas encore été coulés, d’autres avaient trop tôt disparu sous la neige !
Au même moment, le 03 octobre 1974, une nouvelle société d’économie mixte dite S.A.E.M “les téléskis du Grand-Bornand” fût constituée : elle regroupa la régie communale (qui possédait le Terret, la Joyère, la Taverne, le Roc des Arces et les Combes ainsi que le Chouly, le Prarian et l’Almet alors encore en construction) et les anciens actionnaires de la S.A “les téléskis du Grand-Bornand” (qui possédaient la Côte, le Châtillon, les Outalays, le Baby et la Floria) auxquels elle fit la part belle, leur rôle de pionniers dans l’aménagement du domaine ayant été reconnu à sa juste valeur…
Si la S.A “Chinaillon Beausite” survécut aux dures lois du marché, c’était que ses investissements massifs sur la vallée du Maroly avaient été payants, faisant significativement décoller son chiffre d’affaire et dès cette époque, toute ses installations rouges qu’on accusait de polluer visuellement le Chinaillon en été (ce qui était un comble étant donné le nom de cette S.A) furent repeintes en vert foncé !
Toutefois, consciente de sa fragilité et de ses intérêts, la S.A “Chinaillon Beausite” se rapprocha très sensiblement de la nouvelle et puissante S.A.E.M avec laquelle elle s’associa de façon à ne proposer désormais qu’un seul forfait de ski, valable sur toutes les installations…enfin !
Une des premières missions de cette nouvelle société anonyme d’économie mixte (S.A.E.M) fut d’achever, en 1975, la construction du télésiège de la Tolar commencée et interrompue en 1974 :
Ce troisième télésiège, que l’on voit ci-dessus aux côtés du téléski du Maroly sur une jolie photo couleur de M. Missillier, offrit un ski propre intéressant (contrairement aux deux premiers servant principalement de liaison) via une jolie piste exposée au nord et un retour direct du Maroly vers le village du Grand-Bornand en évitant les téléskis saturés du Chinaillon, constituant enfin l’alternative tant attendue au redoutable téléski de la Floria.
Cette année 1975 avait aussi vu la construction dans l’urgence par la Beausite, désormais partenaire voire satellite de la nouvelle SAEM, d’une nouvelle remontée sur le secteur du Chinaillon, le téléski de la Bournerie, qui n’était pas destiné aux débutants mais devait permettre aux skieurs du centre du Chinaillon de gagner rapidement ses installations sur les côtés du domaine skiable en évitant le point noir du téléski de la Floria, il est visible ci-dessous à gauche de celui-ci :
Le centre-école de ski de fond modifia ses statuts, permettant l’arrivée de représentants municipaux en son sein, et devint ainsi “centre municipal de ski nordique”.
L’année 1976 marqua le début d’une nouvelle ère concernant la communication :
On vit apparaître un logo moderne (un flocon stylisé) et cette typographie en gras qui donneraient enfin et pour des décennies à la station l’identité visuelle forte qui lui manquait encore : dès leur apparition, ils furent déclinés dans toutes les couleurs notamment le nom de la station écrit en minuscules en dégradé jaune/orange/rouge (les couleurs des années 1970) et le flocon en bleu, venant légender tout au long de la brochure 76/77 des photos elles aussi dans des couleurs vives et joyeuses en prise avec l’air du temps.
Il arbora un nouveau plan, le premier signé du maître en la matière Pierre Novat, montrant enfin les tracés et les couleurs des pistes :
Ce véritable plan des pistes 1976/77 nous montre l’existence déjà avérée de la piste des Envers revenant vers le village et encore le téléski “Enfants” à l’extrême ouest du Chinaillon :
En 1976 toujours, deux télésièges Montaz-Mautino au design résolument moderne eux aussi (pylônes épurés et véhicules orange) furent construits en même temps par la SAEM, à commencer par le télésiège biplace du Lachat, nouveau et vertigineux point culminant du domaine, destiné à attirer une nouvelle clientèle sportive et à donner au domaine une nouvelle dimension :
Mais aussi le télésiège triplace fixe des Outalays destiné lui à rallier directement le Grand-Bornand village (voir article “le téléski des Outalays“) en évitant les queues effroyables aux pieds des téléskis existants :
Ces deux performants “télésièges oranges” deviendraient, au même titre que le logo et la typographie des publications de l’office du tourisme, emblématiques du Chinaillon !
En 1976 enfin, la S.A “Chinaillon Beausite” fit une dernière fois parler d’elle en installant ses deux ultimes remontées mécaniques, le téléski de la Mulaterie, le long du bois de la Cour, ainsi que son premier télésiège, le télésiège triplace fixe du Châtelet :
Ce nouveau Châtelet était surtout destiné au prestige de la Beausite, qui proposait enfin à son tour un télésiège triplace de surcroît mais de fait, ne servant pas à grand-chose, ledit télésiège n’eut pas vraiment le succès escompté…
La partie estivale du livret 76/77 nous montre sans commentaire un vieux chalet, sans doute celui du Croix, matérialisation du retour progressif vers les valeurs de l’agro-pastoralisme :
Ce fut à partir de ce moment que les bornandins commencèrent à se réapproprier leur patrimoine et à en faire un atout, ce qui aurait une influence jusque dans l’architecture des résidences faisant une plus large part au bois.
Après ces gros coups de part et d’autre qui rajeunirent l’image du domaine, les investissements allaient marquer une pause de deux ans.
A noter l’ouverture en 1977 de la mythique discothèque “Le Baron Noir” au Chinaillon et le démontage du téléski “Enfants” sous la pression immobilière toujours croissante…
Le plan des installations 1977/78, basé sur la même perspective mais qui fait l’impasse sur le tracé des pistes et arbore le logo décliné en orangé, confirme cette disparition après seulement 14 ans de bons et loyaux services à l’initiation du ski :
La SAEM reprit seule les investissements en 1979 avec la construction du télésiège fixe des Languières qui sera le dernier biplace installé au Grand-Bornand et qui fut aussi l’occasion de commander à Pierre Novat un second plan dont la perspective fut cette fois axée sur l’envers du Chinaillon, montrant par-là les versants les plus intéressants mais sans plus évoquer les pistes :
Ce plan matérialise également l’avènement du mini téléski du Crozat, mais surtout la restructuration du télésiège de la Joyère qui devint, suite à un dramatique accident sur la ligne la télécabine quadriplaces de la Joyère, la première du Grand-Bornand :
Comme avant eux les sièges oranges, ces “œufs” oranges aux vitrages fumés deviendraient la nouvelle image de marque de la station, lui conférant par leur seule présence un certain prestige du fait que la télécabine de la Joyère était la plus moderne des Aravis.
Cette transformation réussie s’accompagna du réaménagement de la longue piste des Envers jusque-là rarement fonctionnelle, dont le bas fut désormais bordé d’étranges tuyaux munis d’injecteurs : les premiers canons à neige venaient d’apparaître, et ils n’avaient pas fini de faire parler d’eux !
Ce fut encore la création de l’auberge nordique à Lormay, dans la vallée du Bouchet, terre historique du ski de fond au Grand-Bornand :
Cette infrastructure ambitieuse, un centre d’accueil dédié aux skieurs de fond, permettrait au centre du Grand-Bornand de devenir le premier centre école de France en termes d’activité !
Ainsi s’acheva la décennie 1970, qui fut à ce stade de l’aventure bornandine la plus bouillonnante dans l’histoire du tourisme, et notamment de l’aménagement du domaine skiable…
En 1980, le téléski du Stade (à usage restreint à l’ESF) fut l’ultime téléski débrayable neuf installé au Grand-Bornand, doublant celui de la Floria sur le milieu de son parcours.
L’année 1980/81 vit renouer l’office de tourisme avec une formule de communication qui eût cours dans les années 1960, à savoir les feuillets contenus non plus dans un dépliant mais dans une pochette à rabats conservant le format carré du livret montré précédemment, arborant en extérieur d’un côté une sublime vue du Mont Lachat et de l’autre une non moins bluffante vue aérienne de l’envers du Chinaillon :
Les feuillets internes, thématiques et de taille croissante, en couleurs encore très vives :
Le feuillet vert détaille les activités estivales au nombre desquelles les premiers stages à thème apparaissent, venant enrichir la palette traditionnelle des activités d’été en montagne, et les vieux chalets sont mis à l’honneur.
Comme d’autre auparavant, le feuillet bleu nous renseigne sur le parc hôtelier en 1980 : l’Alpage, le Cortina, le Samance (alors le seul à disposer de sa discothèque “La Déesse de la Nuit”), la Crémaillère, les Cimes, les Amborzales au Chinaillon et la Croix St Maurice, les Écureuils, la Joyère, les Saytels, les Glaïeuls, la Pointe Percée au village !
Et le feuillet orange nous indique quelques restaurants alors en activité, sans toutefois tous les mentionner :
On note que la couleur du logo et celle du nom restent sur le bleu pour l’un et le fameux dégradé jaune/orange/rouge pour l’autre, ici ou là déclinés en noir, tandis que l’intérieur contient non pas un plan mais un “panorama des pistes” instructif en ce sens que justement il nous montre pour une fois le tracé des pistes :
Outre le nouveau téléski “du Stade”, on y voit une piste noire balisée sous le long du télésiège du Lachat (noire dite “de la Côte” ou “du Châtillon”) ainsi que la réalisation d’une nouvelle piste de liaison Chinaillon/village coupant les téléskis de la Côte et du Châtillon, un chemin destiné à pallier l’affluence au téléski de la Côte en fin de journée : les skieurs sont même invités à penser à l’emprunter dans la partie recommandations, au dos du dépliant !
En 1981 la SAEM s’attaqua enfin à la saturation chronique du téléski de la Floria qui malgré l’arrivée de remontées mécaniques nouvelles restait l’axe phare du Chinaillon.
Elle le changea après seulement 20 ans de service pour le télésiège triplace fixe de la Floria ce qui fut une première, car jusque-là on doublait simplement les téléskis existants d’un télésiège ce qui certes modernisait le secteur mais n’en constituait pas une véritable optimisation :
Il s’accompagna de la déviation vers la gauche du téléski de la Bournerie comme le montre l’image ci-dessus.
En 1981 toujours, la méritante SA “Chinaillon Beausite” qui avait dès 1974 perdu son avance et une partie de son indépendance finit par être absorbée par la SAEM vingt ans après sa fondation, suite à un long déclin sans doute accéléré par la construction de son inutile télésiège…
Ce fut donc la SAEM qui mit au rebus le valeureux téléski du Venay alors dépassé, remplacé par deux téléskis fixes parallèles, et en profita pour installer deux nouveaux téléskis du même type au village, “Pont de Suize” (remplaçant le mythique “triangle”) et “Mickey”…
Deux autres télésièges triplaces du même type que la Floria étaient également prévus cette même année dans un tout nouveau secteur encore vierge de remontées mécaniques, la superbe vallée de la Duche : le but était de s’approcher de la Pointe-Percée et d’en équiper les abords afin de river le clou de l’éternelle rivale la Clusaz qui depuis 1962 narguait le Grand-Bornand avec sa mythique combe de Balme, mais ce projet souleva la colère des militants écologistes qui le bloquèrent jusqu’en 1982, année au cours de laquelle les télésièges triplace fixe de la Duche et des Annes seraient achevés contre la garantie de ne pas “s’attaquer” à la Pointe Percée !
La nouvelle pochette, toujours remplie de ses feuillets et au carré grand format, sortit au printemps 1982 :
La face externe, outre une jolie vue du village, nous montre la combe de la Floria et les pistes de l’envers du Lachat où une brèche a été ouverte, première étape vers la création d’une piste de ski grand public…
La face interne, sur laquelle j’ai laissé apparaître les rabats, nous livre le célèbre troisième plan des pistes signé Pierre Novat, dessiné pour tenir compte du nouveau secteur de la Duche constituant la première extension depuis 1974 ainsi que les deux téléskis du Venay :
Les feuillets colorés arborent des couleurs plus froides, mieux en phase avec leur époque :
On y apprend l’ouverture prochaine de l’hôtel “Le Roc des Tours”, au Chinaillon, alors en cours d’homologation pour définir son nombre d’étoiles.
Les nouveaux télésièges ouvrirent fin 1982, donnant accès à un terrain de jeu sublime au sein de la vallée de la Duche :
Au même moment ce fut également l’ouverture du premier 3 étoiles du Chinaillon, le “Roc des Tours”, l’hôtel de Pierre Pochat entre temps devenu maire :
L’établissement était doté d’une piscine extérieure, la première du Chinaillon, d’une salle vidéo et de sa discothèque branchée “Le Farto” qui portait à trois le nombre des établissements de nuit au Chinaillon !
La pochette à rabats 1983/84, dont seule la couverture avant montrant le vieux village changea par rapport à la précédente, me parvint sans ses feuillets donc j’y ai adjoint le listing des remontées mécaniques :
En 1984 les deux derniers télésièges triplace fixes du domaine furent construits, pourvus de nouvelles gares motrices au design repensé, les gares “Alpha” : le premier, les “Terres Rouges”, était destiné à doubler le téléski du Chouly qui étant l’accès principal du Prarian, de l’Almet et depuis peu de la Duche et des Annes saturait complètement alors que le second, le “Crêt”, devait résorber le point noir des files d’attente au télésiège de la Taverne dont le débit n’était plus en relation avec celui de la télécabine de la Joyère.
La pochette à rabats 1984/85 dont voici les deux couvertures :
A l’intérieur surprise, le plan des pistes n’a pas été modifié donc ne mentionne aucun des nouveaux appareils alors qu’en décembre 1984 la clientèle put pourtant découvrir avec joie au Maroly le nouveau télésiège triplace fixe des Terres Rouges (pourvu des familiers sièges “Goutte d’eau”), doublant désormais le Chouly pour le plus grand bonheur des monoskieurs de plus en plus nombreux ainsi qu’un téléski du Maroly raccourci permettant de sécuriser le bas du secteur en évitant que la piste venue de la Cour et de la Tolar n’ait à le traverser…
Conçu à l’origine pour pouvoir être transformé en télésiège triplace débrayable du fait de l’emploi d’une gare Alpha dite “évolutive”, cet appareil n’évoluera hélas jamais :
La clientèle put, certes plus difficilement du fait d’un accès des plus complexes, faire aussi connaissance avec le télésiège du Crêt qui offrait en prime une nouvelle piste bleue en forêt très agréable dans un coin encore vierge de la Joyère…
Ces engins renvoyèrent pour un temps au rang de souvenirs les queues du Chouly et du sommet de la Joyère, il faut dire que la vague de froid record de janvier à février 1985 ralentit hélas un peu les ardeurs des skieurs !
Dès lors le domaine skiable avait quasiment atteint ses limites actuelles, offrant plus de pistes et d’itinéraires que jamais auparavant : il ne s’agrandirait plus de façon réellement significative, les remontées mécaniques de l’époque desservant déjà toutes les pistes existant aujourd’hui même si certaines étaient en fait des hors-pistes, tandis que depuis déjà dix ans les massifs “immeubles chalets” poussaient un peu partout…
Cette brochure intérieure reprit plus largement la célèbre typographie, la déclinant en bleu pour l’hiver et en vert pour l’été, avec à l’intérieur des pages brochées de différentes longueurs rappelant les feuillets.
Elle indique deux nouveaux hôtels, le Sonnerat (Chinaillon) et le Vermont (village) mais annonce aussi une autre nouveauté :
Le “Ski-Pass Aravis” serait un dispositif permettant aux possesseurs d’un forfait semaine au Grand-Bornand de pouvoir skier à La Clusaz et réciproquement au moyen d’une navette spéciale entre les deux stations principales du massif !
Les modalités de cette offre furent précisées dans un dépliant édité à cet effet et glissé dans la pochette, qui révélait un logogramme particulier :
Cette initiative en faveur des skieurs à la semaine était valable trois fois pour les possesseurs du forfait saison, elle allait dans le sens d’un rapprochement plus concret qu’un seul plan des pistes commun.
Ayant accompli sa mission en mettant à jour le parc de remontées mécaniques et en donnant au domaine skiable sa dimension quasi définitive, la prudente SAEM du Grand-Bornand à nouveau endettée entra dès lors dans une nouvelle phase dite de “développement raisonné” afin d’éviter les erreurs des S.A qui l’avaient précédée :
Par contre au milieu des années 1980, les fameux “immeubles-chalets” ou “jumbo chalets” d’inspiration suisse désormais devenus “typique” ailleurs dans les Alpes françaises continuèrent à miter à tout allure aussi bien le village (notamment sur Villavit et au pont de Suize) que le Chinaillon (notamment au Samance et au cœur même de la station, dans la rue principale), soutenant toujours les finances de la commune qui devait faire face aux remboursements des crédits contractés pour l’extension du domaine skiable :
La machine désormais bien rôdée fonctionnera à ce moment-là à plein régime : au grand dam de quelques nostalgiques rien ne lui résista, pas même le vieux village du Chinaillon ni la route de la Côte, le long de laquelle s’implantèrent progressivement de nouvelles résidences à côté des rares chalets anciens ou contemporains déjà existants.
La brochure 1985/86, distribuée cette fois sans pochette mais toujours au format carré, fit pourtant la part belle au patrimoine architectural ancien du Grand-Bornand qui se démarquait ainsi de la plupart des stations :
Notons l’apparition d’un panorama estival une fois encore réalisé par Pierre Novat, reprenant la perspective du premier ouvrage qu’il réalisé pour la station en 1976, d’ailleurs force est de constater que c’est toute cette brochure qui est construite sur le modèle de celle de 1976/77 dont elle reprend les couleurs du logotype originel !
Le listing des remontées mécaniques 1985/86 avec la réintroduction et la généralisation d’un système ancien plébiscité par la clientèle de skieurs occasionnels, la carte à points :
Alors que le patrimoine reprit enfin véritablement ses lettres de noblesse, restait un gros point noir du domaine skiable, celui de la liaison village/Chinaillon : le télésiège de la Taverne avait certes été doublé mais le problème de la queue au pied de la Joyère demeurait, devenant si crucial qu’il menaçait l’attractivité même du village en saison hivernale…
C’est en 1986 qu’allait intervenir la solution miracle, un nouveau téléporté au débit jusqu’alors jamais égalé dans la station (1800 personnes/heure) allait ainsi créer une liaison parallèle, partant du pied des Envers jusqu’à la crête surplombant le hameau de la Côte :
C’est ainsi que la télécabine “du Rosay” vit le jour après un titanesque chantier à l’image de l’appareil lui-même, immense télécabine de 2256 mètres de longueur dotée de 22 pylônes et de véhicules disposant de 12 places chacun.
L’addition, environ quarante millions de francs de l’époque, fut très salée pour la SAEM donc pour la commune qui dût acquérir une partie des terrains survolés par l’engin et les pylônes furent montés en novembre, juste avant de précoces et abondantes chutes de neige (40 cm environ) qui permirent l’ouverture d’une partie du domaine skiable du Chinaillon (de la Cour aux Outalays) dès le 23 novembre : du jamais vu auparavant !
Cette saison d’hiver 1986/1987 se présentait donc pour le mieux avec une nouvelle télécabine juste terminée en rodage, la neige déjà au rendez-vous et en prime une nouvelle discothèque au village, “le Surf”… hélas cela n’allait pas durer.
Car dès le début du mois de décembre, un inhabituel et violent courant du sud perturbé déversa des trombes d’eau bien au-delà de 2000 mètres d’altitude de façon durable, et ce puissant et durable redoux fit presque intégralement disparaître la neige dont ne subsista qu’une dizaine de centimètres vers le Maroly d’en haut : le domaine skiable ferma juste avant les vacances de Noël au nez des vacanciers, avant que ne s’installe de façon particulièrement durable un temps ensoleillé, sec et froid…
On rouvrit cependant la piste du Prarian : la nuit, les camions allaient chercher les névés de la route du col et amenaient la neige au Maroly d’en haut via la route des Bouts, où la dameuse allait l’étaler en un mince ruban.
Le jour, le téléski du Prarian était relié au Chinaillon par une noria de ski-bus rouges qui empruntaient ce même chemin caillouteux, se croisant à peine.
Après 10 minutes de navette et ½ heure de queue, les téméraires skieurs avaient le droit à quelques descentes (dont le nombre fut plafonné afin de pouvoir satisfaire tout le monde) sur un chemin amélioré au ras des rhododendrons qui se finissait sur de la paille : ce pathétique spectacle a marqué durablement les esprits.
A cette époque, les seuls canons à neige se trouvaient sur le bas de la piste des Envers et ne pouvaient pas servir à grand-chose, étant juste conçus pour servir d’appoint à l’enneigement naturel qui jusque-là n’avait jamais fait défaut au Chinaillon : on les fit tout de même tourner pour récupérer leur précieuse production, on fit aussi tourner gratuitement durant toutes les vacances les deux télécabines afin de promener les gens (bien que celle du Rosay ait connu quelques couacs de rodage).
La neige revint bien fin janvier, mais pas en abondance suffisante pour que tout le domaine n’ouvre (pas plus d’une quarantaine de centimètres) et avant Pâques, elle avait déjà disparu.
Cette saison fut l’une des plus moroses jamais vécue au Grand-Bornand : les bénéfices dégagés ne suffirent plus à honorer les dettes record de la SAEM largement gonflées par la construction de l’énorme Rosay, ce qui eut pour effet immédiat de geler toute évolution du domaine skiable.
L’été suivant, un orage d’une rare violence abîma la topographie du domaine mais surtout, il provoqua la dramatique catastrophe du camping emporté par le Borne le 14 juillet 1987 dont les films et les photos firent le tour du monde, écornant encore l’image de la station dont la responsabilité fut mis en cause.
Notons cependant LA bonne nouvelle de cet été 1987 à savoir pour la première fois, la mise en service estivale par la SAEM de la télécabine du Rosay ainsi que du télésiège du Lachat devant le potentiel représenté par le parapente et le “mountain bike” mais, plus que tout, la nécessité impérieuse de rentabiliser ses installations :
Couverture avant de la brochure 1987/88, en grand format, avec le listing des remontées mécaniques :
Après avoir durant quelques années été considérées avec circonspection, les nouvelles glisses s’affichèrent, à commencer par le monoski alors à son apogée :
On aura noté une nette évolution de la mode sur les pistes, les tenues amples violet, fuchsia, vert voire jaune en général associés pour un effet le plus voyant possible régnaient sur les pistes.
On aperçoit même deux snowboards, mais surtout un large recours aux photos d’archives enneigées…toute photo récente montrant la triste réalité aurait fait fuir les clients car hélas l’hiver 1987/88 qui suivit fut différent mais guère plus enneigé, la station put à peine tourner à Noël : la noria de ski-bus vers le Prarian mais aussi cette fois l’Almet et le Chouly (que l’on fit tourner en téléski fixe sur la seconde moitié de son parcours, avec une vitesse lente) reprit…
Le plan des pistes 1987/88 fit la part belle à la télécabine du Rosay, avec la première photo de celle-ci :
S’il neigea un peu en janvier, le redoux fit que dès février on skiait sur des rubans de neige sale au milieu des pâturages roussis : la situation s’améliora en mars mais on finit au printemps par une ouverture des pistes en pointillé au gré des rares et faibles chutes de neige !
L’été fut plus joyeux car après le patrimoine, le “mountain-bike” et le parapente, les activités offertes se diversifiaient encore par notamment le practice de golf, le BMX, l’escalade et les divers spectacles pour jeune public :
Un complément de revenus bienvenu pour la commune et la SAEM car les deux saisons suivantes (1988/89 et 1989/90) furent marquées par l’alternance de la neige toujours en faibles quantités en début et en fin de saison, de la pluie et du soleil dans une ambiance douceâtre ce qui ne permit pas l’exploitation du domaine en continu au-delà du début du printemps : les téléskis fixes pour débutants du “Mickey” et du “Pont de Suize” alors situés au village, du même type que ceux du Venay, durent d’ailleurs dès 1989 être installés plus haut en altitude dans un secteur mieux enneigé au pied de la gare supérieure du Rosay, permettant de créer un espace dédié aux débutants unifié plus adapté que ceux du village et de la Joyère.
De cette époque date aussi la création de la Patinoire artificielle au village, vers les Dodes, de façon à apporter une activité d’appoint qui avait discrètement disparu depuis les années 1970 :
Cette malheureuse conjonction de quatre hivers sans neige enchaînés et de la catastrophe dite “du Grand-Bornand” en juillet 1987 laissèrent les finances de la commune exsangues : l’immobilier s’effondra en dépit de changements successifs du plan d’occupation des sols par la municipalité dans le but d’attirer les investisseurs…
Ajoutons à cela une dette qui explosait et la commune était désormais étranglée, il faudrait un miracle pour qu’elle s’en relève et en ce début des années 1990, la terrible rumeur de la fin du ski au Grand-Bornand circulait de plus en plus ouvertement.
A défaut de pouvoir financer quoi que ce soit sur le domaine skiable, il avait bien fallu durant cette période noire chercher les revenus où ils étaient c’est-à-dire sur l’été, et on peut dire que la longue expérience de la station dans ce domaine fut l’un des éléments qui lui permirent de survivre : ainsi apparurent à l’été 1990 le ski sur herbe et la “trottin’herbe” sur la piste du Mini-Schuss, ce téléski étant à son tour rentabilisé par la SAEM en étant exploité l’été permettant alors de faire du ski et de prendre le tire-fesse sous le soleil de juillet.
L’activité démarra bien, à tel point qu’elle suscita quelques “obstructions” de la part de certains jaloux…on voit ici à l’œuvre Louis Jalle, le pionnier du ski sur herbe au Chinaillon et instigateur de cette entreprise :
Mais cet été-là, les évènements du Moyen-Orient (guerre du Golfe) mirent un coup d’arrêt à l’immobilier déjà moribond : le prix du mètre carré plongea et beaucoup de projets furent retardés de plusieurs années au Chinaillon (comme “Evalp” ou “Les marmontains”).
Après avoir conforté l’été comme jamais auparavant, il fallait d’urgence réagir pour améliorer la situation hivernale : la piste du Prarian ayant deux hivers durant permis d’assurer une offre minimum en ski, il fut donc décidé à l’automne 1990 le démontage du téléski des Bouts sous exploité afin de l’installer plus haut en parallèle à celui du Prarian ainsi que l’achat d’un canon à neige basse pression “Turbo Cristal” mobile Delas, pour la modique somme de 500 000 francs.
Il est vrai que cette spectaculaire publicité avait de quoi marquer les esprits au Grand-Bornand après quatre hivers de misère : sans doute contribua-t-elle à l’arrivée de l’étrange engin ressemblant vaguement à un sèche-cheveux géant de couleur turquoise, qui fut installé en démonstration sur les tennis du Chinaillon en étant alimenté par un tuyau qui venait du torrent en traversant la route entre des planches de bois…
Sa mise en route et le panache qui en résulta, le tout dans un silence relatif par comparaison avec l’installation tout aussi expérimentale des Envers mise en route vingt ans plus tôt, suscita l’admiration béate de l’assistance qui vit bientôt s’accumuler à son pied un tas de “neige” !
Il eût en tout cas le mérite de faire revenir la neige naturelle qui fut abondante durant l’hiver 1990/91, du moins dans les Aravis car ce ne fut pas le cas sur tous les massifs.
Une saison qui vit surtout s’ouvrir le flambant neuf office de tourisme du Chinaillon bâti sur l’emplacement de l’immeuble de meublés “les Grillons” abritant la supérette Vigoureux, faisant ainsi disparaître l’ancien chalet situé en face et offrant non seulement une salle de cinéma mais un accès aux pistes via un ascenseur à l’origine prévu pour être double.
En parallèle le chalet de la Gaudinière fermé depuis déjà quelques années fut détruit pour créer une route reliant la rue principale au front de neige de la Floria, en lieu et place du chemin et de la passerelle.
Mais malgré cette bonne saison, la situation restait critique pour la SAEM qui fut contrainte au développement le plus mesuré possible : l’essai fort concluant du canon à neige du Chinaillon acheva de réorienter sa politique et le développement de la neige de culture, dont elle s’était jusque-là peu souciée, deviendrait une priorité absolue dans l’aménagement du domaine skiable…
Depuis Samivel l’aquarelle était selon les époques plus ou moins à la mode dans la région, mais elle fut lancée au Grand-Bornand avec la redécouverte patrimoniale au cours des années 1980 d’abord sous l’impulsion de Guy Ameyë, puis sous celle de l’illustrateur Daniel Lanoux qui signa la couverture de la brochure de l’hiver 1991/92 :
La diversification dans l’évènementiel qui touchait la saison estivale connut sa déclinaison hivernale en ne s’axant pas que sur la neige, pour mieux toucher la proportion croissante de non-skieurs :
Dans le même but, on commença aussi à décliner l’hiver certaines activités de l’été comme le parapente mais aussi les stages à thèmes comme le bridge ou la poterie “en cas d’enneigement insuffisant”, et entre la brochure 1987/88 et celle-ci on aura noté l’apparition du minitel et de nouveaux logos, prouvant l’engagement de la station dans une démarche de qualité en relation avec les années de vaches maigres qui l’obligèrent à se repositionner.
A part le déménagement des téléskis d’initiation du village vers le plateau du Rosay suivi de l’ajout d’un fil neige et d’une corde pour faire de cet espace débutant l’espace “Fantaski”, le plan des pistes (encore basé sur le panorama 1982 de Pierre Novat) ne montra guère de changement dans le domaine skiable depuis l’arrivée de la télécabine du Rosay si ce n’est le doublement du téléski du Prarian :
Les brochures devinrent bisannuelles, une pour l’hiver et une pour l’été devenu désormais incontournable et très riche en animations diverses, notamment les stages à thèmes tous azimuts :
On voit ici que l’aquarelle a fait place au dessin crayonné, tout comme sur cette affiche :
Le but fut évidemment de mettre toujours plus en avant l’authenticité et l’évènementiel, déjà existant au travers des fêtes pastorales locales, de la “montée impossible” voire du tour de France, qui prit progressivement de l’importance dans la stratégie de diversification et de communication :
En parallèle, le livret 1992 nous renseigne sur l’activité économique d’alors, à commencer par le nouveau nom de baptême du festival jeune public dont l’affiche choquerait quelque peu à l’époque :
Ce festival trouva très vite son public et deviendrait rapidement incontournable, s’imposant comme l’exemple type d’un positionnement évènementiel réussi !
L’hôtellerie au Chinaillon entamait un virage haut de gamme, avec l’apparition d’une seconde piscine au Cortina et la couverture de celle du Roc des Tours qui proposait un centre de remise en forme dernier cri en lieu et place de son ancienne boîte de nuit :
Quelques magasins de sports à l’époque, dont certains historiques :
L’offre en discothèques s’était réduite, une subsistait au Chinaillon, l’autre au village :
Mais aussi :
Le golf prit de l’importance avec le parcours 9 trous :
Tandis que l’immobilier restait en crise, toujours marqué par les incertitudes diverses :
Malgré tous ces efforts l’hiver demeurait la saison reine ainsi, en 1992, la SAEM acheta deux canons autonomes à basse pression de plus, bien que sur le plan des pistes et les encarts ne figure pas encore la mention “neige artificielle” :
Le 04 janvier 1993, la télécabine de la Joyère brûla malencontreusement… l’assurance n’acceptant de payer que si un appareil identique était construit.
La SAEM commanda donc à la société Poma une télécabine quatre places entièrement neuve (à l’exception du bâti de la gare inférieure) sur le modèle de celle alors en chantier dans les Pyrénées, dotée des nouvelles cabines “Espace 4” et qui serait d’ailleurs l’ultime télécabine quadriplace neuve installée en France.
De plus, la SAEM déplaça le téléski de la Mulaterie lors de l’extension vers le Maroly de la route des pistes, réalisa l’installation de deux cordes pour les débutants (le “Castor” et le “Donald”) mais surtout celle de deux mini réseaux d’enneigement basse pression enterrés, alimentés par le torrent du Chinaillon, le premier allait de la Bournerie au pied du Châtelet.
Le second était au pied du Maroly, le long de la piste du Chouly et ces canons étaient déplacés à la dameuse d’un regard à l’autre, la faible quantité d’eau prélevable dans le torrent ne permettant pas un bon rendement…
Tandis que se déroulaient tous ces chantiers, l’été 1993 apporta lui aussi son lot de nouveautés :
La carte à puce “Aravisa”, un porte-monnaie électronique rechargeable ouvrant droit à des réductions, permettrait bientôt de donner accès aux activités de loisirs des stations du massif… enfin surtout celles d’été car le ski resterait à la traîne.
Quant à la piscine elle fut métamorphosée en espace aquatique moderne, avec l’arrivée du toboggan, de l’espace détente, etc… ce nouveau pôle n’irait cependant pas jusqu’à ouvrir en hiver et resterait purement estival.
Nouveautés encore en terme de commerces :
La carte à points avait encore cours :
L’hiver revenu, la télécabine de la Joyère flambant neuve ouvrit au public, tandis que crachaient les canons à neige du Chinaillon :
A l’été 1994, la SAEM dont les affaires commençaient enfin à sérieusement reprendre suite au retour de la neige, put enfin implanter un lac artificiel sur le site du marais de la Cour afin d’alimenter de façon satisfaisante un futur réseau d’enneigement artificiel fixe sur le domaine skiable du Chinaillon, ce qui permettrait enfin l’enneigement ultérieur d’une piste complète.
Le lac de la Cour, retenue collinaire assez importante d’une capacité de 55 000 m³, fut rempli par la surverse issue des diverses sources alimentant le ruisseau de la Cour et relié au nouveau réseau des Terres Rouges, équipé de quelques enneigeurs, mais pas à celui du Chinaillon qui se fournissait encore dans le torrent au grand dam des associations de pêcheurs :
Le choix de cet emplacement fut dicté par la présence d’un ensemble de sources au débit très régulier susceptible d’être captées sans créer trop de dommages à l’environnement : les associations écologistes veillèrent au grain mais avec ce lac, la SAEM allait désormais pouvoir envisager son avenir avec plus de sérénité et l’optimisation du domaine skiable aux installations vieillissantes allait maintenant commencer…
Ainsi, à l’été 1995, le plus grand chantier destiné à la neige de culture qu’ait connu la station jusque-là se poursuivit par la création d’un réseau complet sur la piste des Terres Rouges depuis rebaptisée “Tarines”.
Tout fut fin prêt pour le début de la saison d’hiver 1995/96 :
Un nouveau panorama signé Alain Rolland fut utilisé comme support au plan des pistes, ici le dépliant 1995/96 :
On y voit de petits canons à neige dessinés aux Terres Rouges avec même une publicité de Montagner, la société ayant réalisé l’enneigement de la piste des Terres Rouges (celle qui installa les téléskis du Chouly, du Prarian et de l’Almet dans les années 1970 et qui s’est un temps reconvertie dans la neige de culture avant de disparaître), alors que le grand public n’est pas supposé être son cœur de cible !
L’installation de ce réseau monofluide, qui fut relativement simple à mettre en œuvre étant donné qu’il n’y avait que des canalisations d’eau à y faire passer, fut détaillée un peu plus tard début 1996 dans le magazine “Aménagement et Montagne” :
La “garantie neige” étant là, le marché de l’immobilier ne s’y trompa pas : les chalets individuels alors en vogue recommencèrent à miter toute la vallée du Chinaillon, tandis que les immeubles-chalets toutefois plus petits et mieux intégrés que ceux des années 1970/80 firent leur discret retour.
En cas d’absence de neige, les ski-bus accéderaient facilement aux Terres Rouges en empruntant la toute nouvelle extension de la route des pistes…mais la neige ne manqua pas cette saison !
C’était un bon début, mais cela ne suffisait pas à la SAEM qui à partir de 1997 allait poursuivre ses investissements non seulement dans la neige de culture (en dépit des déperditions du lac de la Cour) mais aussi dans le renouvellement du parc de remontées mécaniques, et après 11 ans d’interruption on eut enfin le plaisir de voir de nouvelles installations !!!
Ce fut le télésiège quadriplace fixe du Châtelet, premier quadriplace du Grand-Bornand ici en construction, qui ouvrit le bal :
Cet appareil haut débit (2400 personnes/heure en théorie, mais plus 2250 en pratique) est doté (comme les Terres Rouges et le Crêt) d’une gare Alpha bleue à 6 vitres (mais à pieds écartés), de sièges “Arceau” (les même que ceux du Crêt, mais en 4 places) et d’un tapis d’embarquement :
Il remplaça le téléski et le télésiège du Châtelet sur un tracé inédit.
Parallèlement, le bas de la piste de la Tolar ainsi que la piste du Lac furent à leurs tours équipés d’enneigeurs monofluides garantissant ainsi l’aller et le retour vers les Terres-Rouges et le mini réseau du Chinaillon fut enfin relié au lac de la Cour, ce qui permit un accroissement de la production sur ce secteur.
En 1997 fut aussi publié un plan prévisionnel pour l’enneigement artificiel en différentes phases, mais qui ne se réalisèrent pas toutes cette année-là et pas forcément selon ce plan :
Car en 1998, le télésiège fixe quadriplace “des Gettiers”, en tout point analogue à celui du Châtelet, vint remplacer les trois téléskis du Baby, du Mini-Schuss et des Outalays : ce fut la nouvelle piste qui en résulta qui fut intégralement équipée d’enneigeurs monofluides à basse pression Montagner, devenant la seconde à l’être.
Ce nouveau réseau (qui se relia au lac de la Cour depuis le sommet du Châtelet en se branchant sur celui de la piste du Lac) permit également d’enneiger le chemin menant du Châtelet au sommet des Gettiers, mais aussi le haut et le bas des Outalays (partie en jaune sur le plan ci-dessus).
On disposa dès lors de trois pistes enneigées (Terres Rouges, Gettiers et Outalays) “reliées” entre elles, à ceci près toutefois qu’il était encore impossible de relier le Châtelet (donc le Maroly) depuis les Gettiers vu que la partie en orange sur le plan ci-dessus ne fut pas réalisée tout de suite, comme le montre le plan des pistes 1998/99 :
On aura noté que le mini réseau provisoire et autonome du Chinaillon, enneigeant les fonds de piste du Châtelet, de la Bournerie et de la Floria était encore opérationnel !
En 1999, la SAEM installa le nouveau télésiège quadriplace fixe de la Tolar en remplacement de l’ancien télésiège biplace, cet appareil différant des deux précédents quadriplaces par sa gare (toujours une Alpha, mais avec 7 vitres fumées noires et à pieds droits) et ses sièges, des “Doudouk” quadriplaces :
Son tapis d’embarquement, comme pour ses deux confrères quadriplaces lui confère un débit théorique de 2400 personnes/heure qui est presque atteint, et son arrivée au sommet de la Floria et non plus en contrebas permit la transformation sans terrassement de deux itinéraires hors-pistes : ces pistes “supplémentaires”, la rouge “des Dames” et le couloir “de la Sonnerie” (autrefois connu sous le nom de “noire des Bouts”) furent dédiés au ski sportif délaissé depuis trop longtemps par la station.
Tout ceci s’accompagna de l’enneigement artificiel, toujours en réseau monofluide et à basse pression, du haut de la Floria, du haut de la Tolar et du haut de la combe de la Floria (aussi nommée “les Languières” puis “les Lanches”) jusque dans le goulet (la rouge “de la Floria”) qui fut aussi équipé jusqu’au sommet des Outalays (voir pointillés roses sur le plan montré plus haut) : le domaine enneigé prit une nouvelle dimension, devenant de facto plus attractif.
En l’an 2000, débutèrent les travaux de la future “piste 2000” au sommet du Lachat (dynamitage et reprofilage du goulet) qui allaient durer cinq années : un record pour une création de piste !
Puis, en 2001, l’optimisation du domaine passa à la vitesse supérieure : à partir de là, fini les télésièges fixes… Ainsi, le Lachat, obsolète, saturé et à bout de souffle fut enfin remplacé…par un télésiège débrayable six places !!!
Le nouvel appareil de type “Phoenix 6”, doté de gares “Satellit” (dont la gare aval entièrement tavaillonnée sur demande de la commune) et de sièges “Doudouk” six places équipés des pinces débrayables “Oméga” fut installé non sans mal par la société Pomagalski car il fallut en changer le tracé, suite à la découverte d’une faille géologique :
Quand il ouvrit le 31 décembre 2001 en plein après-midi, la clientèle se précipita pour essayer la merveille dont l’installation avait été attendue depuis des années et dont l’ouverture l’était depuis le début de saison !
Bien sûr, il y eût de petits couacs classiques (erreurs de cadencement des sièges dues au rodage, arrêts prolongés avec évacuation par le moteur de secours) mais l’appareil enchanta tout le monde : on ne parla que de lui dans les mois qui suivirent et ce fut une révolution sans précédent sur le domaine, au point qu’il devint le fer de lance de la nouvelle image du Grand-Bornand à travers un spot publicitaire télévisé dont le slogan était “le Grand-Bornand change d’allure”, du jamais vu !
Parallèlement, afin de garantir son accès, le bas de la piste des Languières fut terrassé, doté d’une adduction d’eau et enfin équipé d’enneigeurs bifluides, il en fut de même sur le chemin de retour Côte/Outalays, qui permettrait désormais le retour au Chinaillon tout au long de la saison.
Et depuis le sommet du Lachat, les skieurs pouvaient emprunter une nouvelle “piste 2000” encore inachevée et dangereuse, mais pleine de promesses.
Tout ceci contribua à provoquer l’accélération du bétonnage et la spectaculaire hausse des prix de l’immobilier, également initiée par les campagnes de publicité ciblées de la station à destination de la clientèle étrangère notamment belge et anglaise qui arriva dès lors de plus en plus massivement.
Le Grand-Bornand, effectivement, “changeait d’allure”, reniant progressivement la clientèle qui l’avait créé pour une autre plus haut de gamme, plus internationale aussi :
Le télésiège fit aussi la couverture du magazine Aménagement et Montagne en mars 2002, année durant laquelle les investissements furent consacrés à la création d’une centrale de compression d’air pour optimiser le réseau bifluide existant et au passage en bifluide du réseau du bas des Outalays par prolongement de celui évoqué ci-dessus :
En 2003, à partir du réseau des Gettiers, on dériva une branche vers la Mulaterie permettant l’enneigement de la liaison par ces désormais incontournables perches bifluides, remplaçant là encore les canons ventilateurs en bas du Châtelet.
Mais surtout, le bon vieux téléski du Maroly céda la place au nouveau télésiège débrayable six places Poma du même nom, le second du domaine, dont les caractéristiques techniques sont identiques à celles du Lachat (gares “Satellit”, sièges “Doudouk” 6 places) et dont la réalisation s’accompagna de travaux de terrassement titanesques sur le haut du plateau de la Nouvelle (100 000 m³ de terre déplacée !!!) dont la partie la plus spectaculaire fut le rabotage de la crête du plateau dans l’unique but d’offrir aux touristes une superbe vue sur les Aravis hélas bientôt gâchée par la pose du filet :
Son débit provisoire de 2250 personnes/heure renvoya dès son inauguration au rang de souvenirs les queues au pied des installations du secteur, qu’il concurrença dès lors très fortement : l’appareil fut comme celui du Lachat aussitôt adopté et loué par la clientèle, contribuant à dorer davantage l’image de la station et à y faire flamber les prix.
Cette année vit aussi disparaître les historiques téléskis de la Cour : alors que cela avait été envisagé, ils ne furent pas remplacés…
En 2004, seules furent installées quelques perches sur la Floria au niveau du bois de la piste des Pessotays (ex “Noire des Pylônes”), à partir du réseau Côte/Mulaterie déjà cité.
L’année 2005 vit la poursuite de l’extension des réseaux de neige artificielle à la Floria sur la piste des Eglantines, ainsi que la restructuration du vieux réseau du bas de la piste des Envers dont le bas fut à cette occasion heureusement repensé, notamment du fait d’une déviation de la piste.
Ça a pas mal déménagé aussi au Maroly, avec de nouveaux terrassements sur la piste rouge des Chardons, et l’achèvement (enfin !) de la Piste 2000 dont le bas a été créé de toute pièce dans le mur du Maroly, sur l’emplacement de l’ancien raidillon du téléski.
Et bien sûr, il y eût le creusement du nouveau lac artificiel géant destiné offrir à terme la possibilité d’enneiger 80% du domaine actuel et d’une capacité de 303 000 m³ sur le plateau de la Nouvelle, titanesque ouvrage commencé en 2005.
L’hiver 2005/06 fut très enneigé donc les travaux du lac du Maroly ne purent pas reprendre avant fin mai : alors qu’il était presque achevé à l’automne 2006, un imprévu obligea à en reprendre l’étanchéité et il ne put servir…
Bien dommage, car l’hiver 2006/07 fut précisément le premier hiver “sans” neige depuis 1989/90… à ceci près que cette fois les canons à neige et le lac de la Cour firent toutes les preuves de leur utilité, en permettant d’assurer la saison dans des conditions correctes :
La lac du Maroly fut enfin achevé, après un long chantier plein d’imprévus, à l’automne 2007 :
Un automne 2007 qui vit également le retour du téléski “en dur” et à enrouleurs qui plus est au Bois des Raiches, où un appareil de 460 mètres destiné aux débutants et desservant une jolie piste verte qui aussi modeste soit-elle constitua la première extension du domaine depuis 1984, permit d’assurer également le retour vers la Joyère et le village en délestant le téléski de la Côte :
Chose inédite au Grand-Bornand depuis 1945, il fut construit par un constructeur étranger, l’autrichien Doppelmayr, qui remporta du même coup le marché de la construction du troisième télésiège 6 places débrayable du domaine, la Floria.
Il devait initialement comporter un débarquement intermédiaire au sommet du Châtelet qui permettrait outre le téléski de la Bournerie et le télésiège triplace de la Floria, de faire aussi disparaître le télésiège du Châtelet qui serait installé ailleurs sur le domaine.
Le chantier commença en haut en octobre 2007 par les fondations de quelques pylônes :
Entre temps les élections municipales ayant eu lieu, il fut décidé de ne pas réaliser l’estacade intermédiaire donc de conserver le Châtelet !
Après l’hiver, en mai 2008, le télésiège triplace de la Floria et le téléski de la Bournerie furent démontés pour lui céder la place :
Le chantier du troisième télésiège débrayable s’acheva lui aussi après toutes ces péripéties en octobre 2008, en rendant le front de neige méconnaissable (destruction de bâtiments historique dont celui de la Beausite, rasage de la forêt du bas, terrassements de grande ampleur face aux résidences) :
Mais l’hiver 2008/09 venu, il contribua une fois encore à l’augmentation du chiffre d’affaire de la SAEM du fait de ses performances indiscutables !
Heureusement, car celle-ci avait de nouveau pris des risques financiers en investissant si massivement au cours de ces années 2000 qui s’achevaient : de toutes celles qui firent l’histoire du tourisme sur la commune, ce fut cette décennie qui vit le plus d’investissements de masse, et on pouvait déjà dire que le slogan de 2001 “le Grand-Bornand change d’allure” avait été prémonitoire… il faudrait maintenant calmer le jeu le temps que les dettes s’apurent.
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Guillaume ATTARD pour Ski-aravis.com © 2006/2009/2015 – Droits réservés
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Bibliographie et iconographie :
- Prospectus de l’hôtel de la Croix Saint-Maurice (1929)
- La revue du ski (FFS) n°7 (septembre 1931)
- La revue du ski (FFS) n°9 (septembre 1931)
- “Le Ski” n°136 (novembre 1957)
- “80 ans de sports d’hiver à La Clusaz, au Grand-Bornand et dans le vallée de Thônes” (1982/1990)
- Magazine “Aménagement et Montagne” n°133 (1996)
- Magazine “Aménagement et Montagne” n°145 (1998)
- Magazine “Aménagement et Montagne” n°157 (2000)
- Fascicule édité à l’occasion des 50 ans de l’ESF du Grand-Bornand (2001)
- Magazine “Aménagement et Montagne” n°170 (2002)
- Journal du Dauphiné Libéré (2002)
- Magazine “Aménagement et Montagne” n°179 (2003)
- Dépliants du syndicat d’initiative puis de l’office du tourisme des années 1950 à 1990, dont certains obtenus par l’intermédiaire de Jérôme Rolland
- Cartes postales et photographies diverses des décennies 1900 à 1990, dont certaines obtenues par l’intermédiaire de Jérôme Rolland
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Les anciennes remontées mécaniques du domaine skiable
Les avez-vous connus, ces appareils qui ont fait partie de l’histoire du Grand-Bornand ? Même s’ils ont disparus, leurs souvenirs sont conservés dans cet historique. Les différents appareils vous sont ici présentés, accompagnés de leur reportage pour les appareils disparus récemment. Les historiques ont été rédigés par Guillaume Attard aidé par Jérôme Rolland, et Félicien Missillier a fourni de très nombreuses photos pour les illustrer et ainsi vous montrer une autre image du domaine skiable que vous n’arriveriez plus à retrouver aujourd’hui. Une fois de plus, je les remercie pour avoir contribué à créer ces historiques.
La station du Grand-Bornand a compté 31 remontées mécaniques qui ont disparues, avec ou sans remplacement, ainsi que 2 appareils déplacés et modifiés. Les télécordes et tapis roulant n’apparaissent pas dans ce listing (hormis le fil neige de l’Envers, un appareil particulier et emblématique du village).
Cliquez sur les liens pour consulter l’historique ou le reportage de la remontée choisie.
Appareil |
Années d’exploitation |
Constructeur | Accès historique |
Accès reportage |
TKE2 des Dodes | 1945-1950 | >> Accès historique << | ||
Fil neige de l’Envers du village | 1944-1947 | Habitants du village | >> Accès historique << | |
TKF1 des Enfants | 1963-1977 | Pomagalski | ||
TKD1 de la Floria | 1961-1981 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TK du Pont de Suize (dit le “triangle”) | 1967-1981 | |||
TKD1 du Venay | 1967-1981 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TKD1 des Bouts | 1972-déplacé en 1990 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TKD1 de la Mulaterie | 1976-déplacé en 1993 | Pomagalski | ||
TSD2/TCD4 de la Joyère | 1973-1993 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TKD1 du Châtelet | 1966-1997 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TSF3 du Châtelet | 1976-1997 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TKD1 des Outalays | 1953-1998 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TKD1 du Baby | 1958-1998 | Pingon / Pomagalski | >> Accès historique << | |
TKD1 du Mini-Schuss | 1967-1998 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TSF2 de la Tolar | 1974/1975-1999 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TSF2 du Lachat | 1976-2001 | Montaz-Mautino | >> Accès historique << | |
TKD1 du Maroly | 1972-2003 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TKD1 de la Cour 1 | 1972-2003 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TKD1 de la Cour 2 | 1961-2003 | Pomagalski | >> Accès historique << | |
TKF1 de la Galerie (ex Pont de Suize 2) | 1981-2007 | Pomagalski | ||
TKD1 du Terret | 1961-2007 | Montaz-Mautino | >> Accès reportage << | |
TKD1 de la Bournerie | 1975-2008 | Pomagalski | >> Accès historique << | >> Accès reportage << |
TSF3 de la Floria | 1981-2008 | Pomagalski | >> Accès historique << | >> Accès reportage << |
TKD1 du Chouly | 1974-2009 | Montagner | >> Accès reportage << | |
TKD1 des Combes | 1973-2012 | Pomagalski | >> Accès reportage << | |
TSF3 du Crêt | 1984-2015 | Pomagalski | >> Accès reportage << | |
TKF1 du Rosay (ex Pont de Suize 1) | 1981-2016 | Pomagalski | >> Accès reportage << | |
TKD1 du Crozat | 1979-2018 | Pomagalski | >> Accès reportage << | |
TSF2 des Languières | 1979-2018 | Pomagalski | >> Accès reportage << | |
TSF4 des Gettiers | 1998-2019 | Pomagalski | >> Accès reportage << | |
TSF3 des Outalays | 1976-2019 | Montaz-Mautino | >> Accès reportage << | |
TKF1 du Baby (ex Venay 2) | 1981-2019 | Pomagalski | >> Accès reportage << | |
TKF1 du Venay | 1981-2019 | Pomagalski | >> Accès reportage << | |
TSF3 de la Duche | 1982-2024 | Pomagalski | >> Accès reportage << |
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Rappel des abréviations de remontées mécaniques :
Toutes les abréviations sont suivis d’un numéro qui indique le nombre de places par véhicules (ou par agrès suivant le type d’appareil).
- TKD : téléski à perches découplables (appelé aussi téléski débrayable)
- TKE : téléski à enrouleurs
- TKF : téléski à perches fixes
- TSF : télésiège à pinces fixes
- TSD : télésiège débrayable
- TCD : télécabine débrayable
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Graphique représentatif du nombre de remontées mécaniques au Grand-Bornand, par type depuis 1944
Toutes les remontées mécaniques disparues ou en service sont présents dans le graphique, sauf le téléski du Pont de Suize dit “le triangle”, le fil-neige de l’Envers, les télécordes et les tapis roulant réservés à l’école de ski :
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